Comment, en quelques lignes, vous partager et vous transmettre un peu de l’énergie générée durant cette session de formation au Théâtre de l’opprimé en janvier 2020 à Bobo ?

Pour ceux qui l’ignorent, depuis janvier 2017, les équipes de Sitala du Faso se forment à la méthode du théâtre de l’opprimé ainsi qu’au Clown Acteur social. Pour cela, des associations françaises (« Ficelle et compagnie » en Auvergne et « Si les sardines avaient des ailes » en Bretagne) ont été accueillies à Bobo à plusieurs reprises afin d’animer des sessions de 15 jours de formation mais également des résidences de créations sur différents thèmes locaux : le travail des enfants, l’héritage des femmes veuves, prévention du sida et du paludisme, traitement des déchets, les grossesses précoce etc. Sitala du Faso a depuis créé une équipe d’intervention, « les sardines du désert », en capacité d’animer des spectacles et des ateliers à Bobo-Dioulasso depuis 2019.

 Une session 2020 exceptionnelle sur de nombreux aspects 

Premièrement du fait de la situation politique au Burkina Faso, avec un risque d’attaques terroristes plus présent et la montée du sentiment anti-français. Pour ces raisons de sécurité, seulement deux stagiaires françaises sont venues participer à l’expérience (Angélique, médecin néphrologue à Caen intéressée par l’outil en termes de prévention des maladies rénales, et Tiphaine, stagiaire Sitala en formation sur les projets de solidarité internationale). De part cette situation, Sitala du Faso a organisé une formation moins publique, plus discrète, plus courte qu’habituellement. La formation s’est déroulée sur 4 jours au centre de quartier de Sitala et non sur 10 jours à la Maison de la Culture comme les années précédentes. Elle a cependant réuni près de 20 stagiaires proches de Sitala dont les deux dirigeants, Benoit en France et Mamadou au Faso, ainsi que les services civiques antérieurs, ceux à venir et des bénévoles ou partenaires actifs de l’association.
Deuxièmement, et pour celles et ceux qui ne seraient pas informés non plus, deux membres de l’équipe des Sardines du Désert ont « déserté »  lors de leur dernier séjour en France. Ça a été un coup très dur pour tous mais particulièrement pour l’équipe à Bobo qui est restée, qui a dû garder la motivation, l’énergie de poursuivre les interventions en théâtre forum (avec un sentiment de tout avoir à recommencer). Lass et Arouna ont fait un gros travail de mobilisation en interne pour reconstituer une équipe mixte et extrêmement motivée par les valeurs de lutte contre les oppressions. Cette formation était aussi organisée pour consolider tout ce travail de mobilisation, remercier et renforcer l’équipe.

C’est également pour cela que cette année, la formation était co-animé par les professionnels des Sardines du désert : Lass et Arouna. En effet, ils avaient déjà suivi plus de 8 semaines de formation depuis 2017 et dans leur processus d’apprentissage, ils en étaient à apprendre à transmettre la méthode. C’est pourquoi, ils ont co-animé cette formation avec les formatrices de « Si les sardines avaient des ailes » cette année, Aude et Delphine. Cette étape prend pour nous beaucoup de sens pédagogique dans l’idée, qui est au cœur de nos collaborations, de créer mutuellement les conditions pour que les autres puissent faire par eux-mêmes. 
Enfin, pour la deuxième année consécutive et à l’encontre des habitudes au Burkina Faso, Sitala a demandé un engagement et une participation financière à chaque participant-e. Il faut savoir qu’habituellement au Burkina Faso les stagiaires ont un système de per-diem pour participer aux formations. C’est-à-dire qu’ils reçoivent une somme d’argent en contrepartie de leur participation à la formation. C’était donc là le contraire et chaque participant a payé pour participer à la formation. C’est ce co-financement des stagiaires, qui a permis de prendre en charge les repas du midi, les collations, et une petite part de participation aux frais de création du spectacle sur la deuxième partie du séjour.
Rajoutez à ça que, à de rares exceptions près, tout le monde était là et à l’heure ! Nous vous assurons qu’il y avait une motivation rare et précieuse dans ce groupe magnifique.
A titre d’informations, différents sujets ont pu être abordés durant ces 4 jours : le terrorisme et la radicalisation, les violences faites aux femmes, la discrimination des artistes dans la société, le rêve occidental et désir de migration clandestine.
Sur la deuxième partie du séjour, 10 membres de l’équipe ont poursuivi le travail pour une résidence de création sur le thème de la migration. Cette thématique avait déjà été travaillée et jouée en France en vue de son adaptation au Burkina Faso. Elle a donc été reprise et étoffée avec les nouveaux membres de l’équipe.
C’est l’histoire d’un jeune homme, passionné de Football, Hamidou, qui, encouragé par sa famille en particulier (et la société en général), se risque à prendre la route du Niger, puis la Syrie jusqu’en l’Italie où ses problèmes et difficultés seront loin d’être terminés une fois arrivé en France.
Nous avons eu la chance de pouvoir jouer cette scène à l’université de Bobo-Dioulasso. Après avoir attendu des heures sur un carrefour au sein de cette immense université, nous avons eu le plaisir de jouer et de réaliser avec enchantement combien elle a fonctionné avec les étudiantes et les étudiants. Suite au spectacle, le nombre de témoignages sur les réalités et les questions de ces jeunes quant à la migration est la meilleure preuve de la pertinence de cette action. Elle a pu aussi être vue par de nombreux élus locaux.
On vous partage pour finir que depuis février et suite à ce séjour, l’équipe était,  jusqu’à l’arrêt lié au confinement, très dynamique. Ils ont rejoué ce spectacle, fait des interventions avec les enfants des rues. Ils travaillent actuellement deux nouvelles thématiques phares : les violences intrafamiliales et particulièrement les violences faites aux femmes ainsi que le thème de la radicalisation et du terrorisme, malheureusement très présent dans leur réalité quotidienne.
Ils ont besoin tout comme nous, de sentir qu’il y a du monde avec eux, alors n’hésitez pas à aller sur le Facebook de Sitala du Faso regarder ce qu’il y a déjà et leurs futures activités.
Vivent les sardines du désert et le théâtre de l’opprimé !!

 
 

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