Nella Tribolles est secrétaire et administratrice de l’association Sitala Lillin’ba. Après avoir grandit en Afrique, elle est revenu vivre en France. Imprégnée des cultures française et Africaine, elle porte un regard pertinent sur notre société ainsi que sur le sens et les valeurs de l’association. Cet entretien est le premier d’une série de portraits présentant les gens qui forment Sitala en France.
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Nella, tu as vécu en Afrique pendant 20 ans, quelle est ton histoire ?
Mon père était conducteur de travaux en éléctricité entre 1960 et 1980. Il était employé par des sociétés françaises qui travaillaient en Afrique au cours de la période de la France-Afrique francophone. Il était missionné pour faire des chantiers. A chaque chantier, nous repartions pour un nouveau pays africain. Lorsque je suis parti en Afrique j’avais un an. Je suis revenu à l’âge de 13 ans. J’ai eu la chance extraordinaire de parcourir toute l’Afrique de l’ouest. Lors de ses missions, ma mère était très souvent la secrétaire de mon père. J’ai été élevé avec des nounous et j’ai reçu une éducation « A l’africaine ». Par exemple, pour manger, tu en avais gros comme ça et tu n’avais pas le droit de boire. En Afrique on te dit que si tu bois de l’eau, tu fais gonfler ton ventre et tu n’as plus faim. C’est plein de truc comme ça.
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Qu’est ce que tu retiens de cette éducation ?
L’accueil, la chaleur, passer du bon temps avec les gens, la fraternité, aider les autres tout en ayant sa propre vie. Je ne vais pas tout sacrifier pour les autres, mais je veux au moins apporter quelque chose, même si ce n’est pas longtemps. En fait, je crois qu’il ne faut pas passer à côté des gens et des belles choses à se dire. Il faut profiter de l’instant présent et partager, c’est que je retiens.
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Comment s’est passé ton retour en France ?
C’était un choc, c’était l’hiver. Mettre des bottes … ça m’a fait bizarre, c’était compliqué. Les autres parlaient de choses que je n’avais jamais vu. Il y avait une différence de culture très forte. J’ai été élevée en Afrique désertique, sous la chaleur, en Tongue ou pied nu, enculotte, sans télé sans rien, tu imagines le truc… Quand je suis arrivée ici je n’avais jamais regardé la télé et mes copines me disaient : « tiens t’as vu ça ? ». Pendant quinze jours, trois semaines j’ai menti. En rentrant je demandais à mère : « c’est quoi Louis de Funès ? ». Et puis j’ai pris conscience que je ne pourrais pas rattraper tout le retard accumulé, impossible. J’ai ensuite dit la vérité : « Je ne connais rien de tout ça, j’ai vécu en Afrique. Par contre je peux vous raconter autres choses ». Du coup, c’est devenu ma force. J’avais aussi du mal avec les saisons, je n’arrivais pas à reconnaitre les saisons. Je ne connaissais que deux saisons : la saison des pluies et la saison sèche.
Dans les rapports humains, c’était plus dur aussi. Chacun restait chez soi, il n’y avait pas vraiment de partage. Je m’en rendais déjà compte à 13 ans. Même accueillir des gens était difficile. Les gens étaient hésitant, ici les gens ont peur. Ils n’ouvrent pas leur porte, alors que je le fais naturellement. Il ne faut pas non plus que cela dur 3 semaines, mais mon premier instinct c’est dire : « Entrez! ».
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Comment as-tu rencontré l’association Sitala ?
Avant de rencontrer Sitala, il faut dire que je suis retournée vivre en Afrique avec mon mari, cinq ans au Cameroun et cinq ans au Gabon. Je suis rentré e accoucher de mes deux enfants en France, mais nous avons vécu en Afrique pendant dix ans. En fait, j’ai reproduis le même schéma pour mes enfants que pour moi. A notre retour, j’ai cherché du travail en France, fin 2001. J’ai d’abord trouvé un travail dans une thalasso. Cela ne me plaisait pas alors j’ai voulu retourner dans l’enseignement. J’ai travaillé dans l’enseignement en Afrique, j’ai été formée par des institutrices africaines. J’ai souhaité retrouver ça en France. J’ai fait un CAP petit enfance. Je me suis dit, « Tant qu’à faire, autant faire mon stage dans l’école de mes enfants » à l’école Saint Cécile de Theix. Ils ont accepté et à la fin de ma formation ils m’ont dit « On t’embauche ». L’année suivante Ben et Madou sont arrivés dans l’école…
Bernard (le directeur de l’école) a entendu des Tam Tam. Il sort et va voir d’où ça vient et là il rencontre Benoit et Mamadou. Ils étaient au centre aéré pour faire un stage. Il leur a alors proposé de revenir le voir pour un projet à l’école Sainte Cécile. Trois mois plus tard, au mois de mars, ils débarquent pour trois mois de projet dans l’école : douze classes, des créneaux, tous les instits. Il fallait qu’on prépare un spectacle. Le deuxième jour, je leur ai demandé où ils dormaient, ils m’ont répondu : « Dans notre camion ». Je leur ai dit : « Attendez, Simon va dormir avec sa sœur, vous allez prendre sa chambre le temps de trouver une maison ». Trois quatre jours plus tard, ils ont trouvé une maison. L’aventure a commencé comme ça…
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Écoutez l’entretien…